Mon sabre tranche la chair et sépare la tête aux superbes yeux clairs de son corps dans un arc parfait. Privé du muscle moteur et vital, le reste du corps s'effondre sur lui même, touchant le sol dans un bruit étouffé. L'autre partie roule doucement à quelques mètres de moi. Je prends un morceau des habits désormais inutiles au cadavre et essuie la lame noire rassasiée. Autour de moi trois cadavres, tous sans têtes. Dans la neige, une mare de sang, étrange et macabre spectacle mais étonnamment beau. Le bas de mon Akama est lourd, ayant absorbé non pas de l'eau comme on peut le penser mais de sang. Tout comme mes chaussures. Je range Mi Feng dans son fourreau et me mets au travail. Malgré le froid, je suis en débardeur et la sueur perle sur ma peau. Pendant la demis heure qui suit j’attrape tête et morceaux de cadavre pour les empiler en un joli tas. Puis j'y verse essence et combustible. Dans un frottement le feu prend vie et s'élance vers le ciel. Là, devant le bûcher, devant les derniers corps des derniers vampires hostiles de Chine, l'adrénaline qui a fait rage dans mon corps pendant la bataille se calme enfin comme la mer après une tempête. Ici, dans la foret non loin de Longmen, les grottes sacrées, je comprends les paroles de mon professeur des années plutôt. 

Que vais-je faire après. Du haut de ma courte vie, je n'ai fait que chasser. Apprendre et chasser, chasser et apprendre. Me perdre quelques temps puis trouver ma voie. J'étais une chasseuse, oui, je suis une chasseuse. Mais que faire lorsque il n'y a plus rien à chasser ?

Un soupir se mêle au vent frais. Je met ma veste et prends mon sac. Je tourne le dos à la chaleur du brasier pour entrer sous la canopée. Ce n'est qu'un peu plus tard, devant les grottes sacrées, que la réponse me vient dans une brise douce. Il suffit pour le chasseur d'aller là où il y a les proies. Je m'arrête et fait une rapide prière pour remercier les esprits de m'avoir aiguillé, puis un sourire sur mes lèvres, je part faire mes préparatifs. 

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Mon pied se pose pour la première fois sur le sol Américain. Après deux mois de préparatifs, pour le voyage, pour l'endroit où habiter, pour mes affaires, le peu que j'en ai, je suis arrivée dans le pays surpeuplé de monstres en tout genre. Je n'ai jamais compris l'attrait des autres jeunes de mon âge pour les Etats-Unis, je ne le comprend toujours pas. Par contre, les défauts de ce pays, l'opulence, la surpopulation et bien d'autres sont d'un grand attrait pour tout monstre maléfique qui se respecte. Voila pourquoi je suis ici.

 

Bien sur, j'ai déjà voyagé pour des missions, en France, en Italie, sur quelques îles équatoriales, dans le sud de l'Afrique et même en Amérique du Sud, et ce n'est pas nouveau pour moi, mais jamais je ne m'habituerai au choc culturel. Heureusement pour moi, je ne suis pas pauvre. Les hangars désaffectés achetés pour séjourner dans ce pays me permettrons de me sentir plus à l'aise. Mon professeur m'a appris cette astuce. Acheter un grand local et en rénover seulement l'intérieur. De ma main maîtresse je pousse la porte de fer blindée pour entrer dans mon pays. Enfin, un échantillon de mon pays. Le jardin zen m’accueille, inondé de lumière par le toit en verre. Mes pieds frottent contre le pont en bois, je regarde avec une pointe de satisfaction la dizaine de bassins de différente tailles, reliés par une ou plusieurs cascades se transformer en un ruisseau. Ce dernier serpente à travers le jardin pour disparaitre au coin de la maison traditionnelle qui s'élève en plein milieu. Me tenir sur ce petit pont, entourée par une vue et un sentiment familier me fait du bien après un voyage chaotique et un sentiment d'abandonner mon pays. Le calme m'envahit. Mon pas se fait plus léger. Je me dirige alors vers la maison traditionnelle. Mon intuition n'a pas failli. Oui, ici je vais pouvoir vivre.

 

Mon regard parcourt la dernière pièce d'identité que vient de me donner l'officier. Ou agent. Je ne connais pas très bien les grades officiels de ce pays encore. Grâce à quelques relations, j'ai eu un badge de tous les services nécessaires. FBI, Marshals, Rangers, Services publics, bref, une boite entière. Par les esprits, c'est tellement plus simple en Chine. J'ai juste à montrer mon petit insigne, un dragon d'argent toujours attaché au revers de mon kimono pour qu'on m'obéisse au doigt et à l’œil. Sans jamais poser de question. Ici, apparemment, ce n'est pas le cas comme le prouve la boite que me remet l'agent en face de moi. Des dizaines de pièces d’identité, et des regards noirs de la part des agents de sécurité et officiers présents dans la pièce. Manifestement pas d'accord pour laisser partir de tel objets de pouvoirs entre les mains d'une inconnue étrangère. Mais malheureusement pour eux, mes amis sont plus puissants que les leurs.

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Je fait glisser Mi feng dans son fourreau pour vérifier si elle entre et sort bien. Cette Masamune à été faite il y a très longtemps, mais elle n'a choisit son propriétaire que pendant ce siècle. Elle m'a fait cet honneur. Ma meilleure amie. Je ne peux m'empêcher de sourire en repensant à l'agacement des agents de sécurité obligés de me laisser mon sabre alors que j'entrais dans l'enceinte de leur bâtiment. Les pauvres. Aujourd'hui n'a pas été une bonne journée pour eux. Geste répétitif et machinal, je refis glisser Mi Feng et le sourire toujours aux lèvres je sort dans la nuit froide de cet hiver américain. Allons chasser.

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